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Transformation Digitale des RadiosRadio in France

Les radios françaises ont perdu 18 millions d’auditeurs en 10 ans. Et ce n’est que le début.

By décembre 3, 2025#!31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z1431#31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z-11+00:003131+00:00202531 06am31am-31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z11+00:003131+00:002025312025sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +000049114912amsamedi=96#!31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z+00:0012#décembre 6th, 2025#!31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z1431#/31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z-11+00:003131+00:00202531#!31sam, 06 Déc 2025 11:49:14 +0000Z+00:0012#No Comments

Entre janvier 2015 et janvier 2025, les 10 plus grandes radios nationales françaises ont perdu 28% de leur audience cumulée. Cela représente environ 18 millions d’auditeurs quotidiens de moins. Ces chiffres ne viennent pas d’une intuition ou d’un ressenti : ils sont issus des données publiées par Médiamétrie via les vagues « 126 000 Radio » de janvier à mars 2015 et « EAR National » de janvier à mars 2025, respectivement.

Et non, ce n’est pas une dégringolade brutale. Si on regarde année par année, la courbe semble en léger recul, presque stable. Une baisse légère, contrôlée. Mais c’est un leurre. Nous sommes au tout début de la courbe en S, le schéma classique d’une transformation technologique au sein d’une industrie. Ce que l’on perçoit comme une simple érosion va continuer à s’accélérer. Et cette accélération sera brutale, surtout pour ceux qui n’ont rien vu venir.

Le fossé générationnel est en marche

La radio est aujourd’hui confrontée à un phénomène silencieux mais massif : le generational cliff (ou fossé générationnel en français). C’est le moment où les jeunes générations ne remplacent plus les anciennes. Le moment où l’audience vieillit… et où personne ne vient derrière.

À première vue, les chiffres d’audience peuvent rassurer : la radio reste massivement écoutée. C’est l’argument préféré de ceux qui refusent de voir les signaux faibles. Mais l’audience s’érode doucement et, en zoomant sur les détails des classes d’âge, on s’aperçoit de grandes disparités. Et là, les chiffres sont alarmants.

Ce phénomène n’est pas franco-français. En Allemagne, 79 % des foyers comptant au moins un jeune de moins de 24 ans disposent d’une radio. Mais moins d’un tiers de ces jeunes possèdent leur propre récepteur. Ils écoutent via leur smartphone, leurs écouteurs, leurs enceintes connectées. Pas via une radio FM.

Demandez à un groupe d’étudiants s’ils savent ce que signifie « 101.3 FM ». La majorité vous regardera avec perplexité. Ce n’est pas de l’ignorance, c’est de l’indifférence. La fréquence FM n’a aucune signification dans leur univers mental. Le linéaire quasiment pas.

Ce ne sont pas que des chiffres. Ils racontent une déconnexion générationnelle profonde. Pour ces natifs du numérique, l’idée qu’un autre choisisse à leur place ce qu’ils doivent écouter et quand leur paraît anachronique. Les habitudes se forment jeunes, et celles qui ne se créent pas à cet âge ne se forment jamais.

Certains espèrent encore que les jeunes « reviendront à la radio en vieillissant ». C’est un pari très risqué. Ils ont grandi avec les playlists personnalisées, les recommandations algorithmiques et le contrôle total de leur consommation de médias. Ce ne sont pas des tendances passagères, mais des attentes structurantes.

C’est exactement ce qui est arrivé à la presse écrite. Quand les anciens lecteurs ont cessé leurs abonnements papier, personne ne les a remplacés. Comme le disait Alain Weill, PDG de L’Express : “60 % des abonnements papier que nous perdons le sont à cause du décès de nos abonnés” (Le Figaro, novembre 2024).

Et même le bastion de l’écoute en voiture, longtemps sanctuaire radio, s’effondre. Selon l’AAA (États-Unis), 29 % des conducteurs américains utilisent leur smartphone pour écouter de l’audio en voiture, contre 15 % en 2014. Le Bluetooth et le streaming s’aprêtent à prendre le dessus.

C’est la fin d’un cycle. Le début d’un autre.

Qui monte, qui descend ? Radiographie d’une industrie en mutation

Entre janvier 2015 et janvier 2025, le paysage radiophonique français s’est profondément recomposé. Pas de manière spectaculaire, pas avec un grand fracas. Plutôt par glissements successifs, érosion lente, déplacements tectoniques. Certaines stations ont perdu des millions d’auditeurs. D’autres, plus rares, ont progressé, parfois contre toute attente.

NRJ incarne parfaitement le drame des musicales commerciales.

En 2015, la station captait 6,3 millions d’auditeurs quotidiens. En 2025, il n’en reste que 4,2 millions. Une chute de 33%. Ce ne sont pas que des chiffres: c’est toute une génération qui a basculé. Les 13-24 ans, cœur de cible historique de NRJ, ont migré vers Spotify, Instagram et TikTok. La promesse d’un “flow musical linéaire” – c’est-à-dire quelqu’un qui choisit la musique à votre place – a perdu toute sa valeur perçue. Pourquoi écouter ce que décide un programmateur alors que vous pouvez devenir votre propre éditeur musical ?

Fun Radio, Skyrock et Virgin Radio (devenue Europe 2) racontent la même histoire. Leur modèle reposait sur une rareté: celle de l’accès à la musique. Cette rareté a disparu. Leur audience avec elle.

Les généralistes ne s’en sortent pas mieux.

Europe 1 s’est effondrée: de 4,9 millions d’auditeurs en 2015 à 2,65 millions en 2025. Une partie du recul est conjoncturelle – changements de grille, ligne éditoriale floue, alternance entre formats déjà vus. Mais le fond du problème est structurel. Europe 1 est trop proche de l’ancien monde pour séduire les plus jeunes, et pas assez distinctive pour retenir les autres.

RTL tient encore, mais perd du terrain: 1,4 million d’auditeurs en moins. La station conserve une base solide, mais subit la même pression d’usure que la presse généraliste. Ses auditeurs vieillissent. Les jeunes ne viennent pas.

Et puis il y a France Inter.

La grande gagnante de cette décennie. En 2015, elle captait 5,6 millions d’auditeurs. En 2025, elle en affiche 7,25 millions. Elle est devenue la première radio de France. Pourquoi? Un journalisme de fond, une identité éditoriale assumée, une réputation renforcée auprès des CSP+ et des retraités éduqués. France Inter offre ce que les autres ne savent plus proposer: une ligne claire, une cohérence, une promesse tenue.

France Culture, FIP, France Musique et Radio Classique progressent aussi, lentement mais sûrement. Toutes ne sont pas dans le top 10. Ces stations proposent une expérience d’écoute “hors tension”, presque méditative. Elles répondent à une demande de qualité, de lenteur et de profondeur. Dans un monde saturé d’urgence et de bruit, elles offrent un refuge. Leur public est plus âgé, certes. Mais leur valeur éditoriale est difficilement substituable.

Nostalgie gagne près de 400 000 auditeurs.

Là encore, ce n’est pas un hasard. La station surfe sur une vague puissante: la valeur refuge de la musique des années 70-80-90. Une musique familière, positive, sans surprise. Dans un monde incertain, cette mémoire musicale agit comme un doudou culturel. Elle rassure. Elle réconforte. Elle ne demande rien.

Trois lignes de fracture apparaissent.

D’abord, toutes les radios orientées “hits jeunes” sont en forte baisse. Le smartphone, les playlists, les recommandations algorithmiques et les réseaux sociaux ont atomisé leurs avantages concurrentiels. Ce qui était leur force (programmer de la musique) est devenu leur faiblesse.

Ensuite, les radios à valeur éditoriale forte résistent. France Inter, France Culture, FIP tirent leur force d’une identité claire et assumée. Leur contenu est difficilement duplicable. On ne les écoute pas par défaut ; on les choisit.

Enfin, la fragmentation devient structurelle. Aucune station ne capte plus l’attention universelle. La médiane d’audience baisse. L’époque des “monstres hégémoniques” est révolue.

La véritable ligne de partage n’est donc pas entre le public et le privé, ni entre le musical et le “talk”. Elle est entre format duplicable et offre singulière. Entre radio “de flux” et radio “de choix”. La première est en recul. La seconde se construit.

Ce que cela signifie pour les radios

L’audience linéaire va continuer à baisser. Cela signifie des revenus publicitaires en recul, des grilles moins rentables, et des difficultés de pilotage à moyen terme. Les stations doivent anticiper cette contraction plutôt que la subir.

L’audience va continuer à se fragmenter. La radio ne sera bientôt plus un média de masse, universel. Les grandes stations nationales ne garantissent plus un reach homogène. Pour les annonceurs, cela signifie plus de complexité d’achat, plus de friction,et cela va impacter les ventes de spots publicitaires. La radio perd sa promesse de simplicité, longtemps son avantage compétitif.

La concurrence ne vient plus d’autres radios. Elle vient des plateformes audio au sens large, des réseaux sociaux, des assistants vocaux et du scroll infini. C’est une bataille pour le temps disponible et l’attention.

Dans ce contexte, être passif est le pire choix. Il faut revoir son offre, ses formats, sa stratégie de distribution, ses compétences internes. Le meilleur moment pour agir, c’était hier. Le deuxième meilleur moment, c’est maintenant. 

Je fais un pari : en 2030 – dans 5 ans – les audiences cumulées des 10 premières radios auront encore perdu au moins 20% par rapport à 2025.

Prouvez-moi que j’ai tort.

C’est la courbe en S dont je parlais au début : une longue phase de stabilité apparente, suivie d’une accélération. Nous y sommes.

Et maintenant ?

Dans mon livre, je détaille un cadre opérationnel en 8 chantiers pour structurer une transformation numérique concrète : stratégie, organisation, données, expérimentation, contenus, distribution, acquisition d’audience, et monétisation. Ce n’est pas un plan miracle, c’est une méthode pour identifier où agir, dans quel ordre, et avec quelles priorités. Pour sortir des débats théoriques et passer à l’action.

Parce que la solution n’est pas de réfléchir plus longtemps. C’est de tester plus vite, avec de vrais usagers. De créer des capacités internes d’expérimentation continue, comme le ferait une startup. De traiter l’innovation non pas comme une idée brillante ou un appel à projet ponctuel, mais comme une compétence collective, un muscle à entraîner.

Vous reconnaissez les signaux d’alerte ?

Vos équipes ne sont pas encore convaincues de ce qui va se passer pour la radio linéaire? Audiotiq propose un workshop de 3 heures avec vos équipes pour qu’elles comprennent l’urgence. Le workshop explique en détail comment le numérique transforme une industrie, comment le fossé générationnel se manifeste, ce que cela signifie pour la radio, comment anticiper ce qui va arriver, identifier vos blocages spécifiques et savoir réagir en conséquence.

Nous travaillerons ensemble sur des études de cas, des chiffres (dont les vôtres), vos enjeux concrets. Pas de langue de bois, pas de “bullshit”. On aborde les sujets qui font mal pour pouvoir avancer avec des méthodes simples, adaptées, réalistes.

Comme je le répète souvent, la radio n’est pas morte. Mais elle doit se transformer. Vite. Il n’y a plus de temps à perdre.

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